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Conte immoral

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  • Conte immoral

    Ce qui suit est une histoire vraie. Ses principaux protagonistes se reconnaîtront peut-être. Salwa Hamrouni a choisi le style de la fable pour nous narrer les péripéties de ce “conte immoral”.

    Si vous n’arrivez pas à découvrir la vérité, et vous serez nombreux, dégustez, au moins, la pureté et la beauté de ce texte.


    Il était une fois une jeune fille pure appelée Colombine qui, même devenue jeune femme et enseignante universitaire, continuait à croire en la valeur de l’engagement politique mais surtout et uniquement si cet engagement avait le c½ur à gauche.

    Les désillusions eurent beau pleuvoir, l’URSS se démanteler, les Cubains se plaindre de dictature et de famine, le “Che” devenir une icône marketing qui permettait de mieux vendre des tee-shirt et des voitures, Aron supplanter Sartre; irréductible, Colombine n’en démordait pas. Elle continuait à conjurer la décadence ambiante par l’attachement à ses idéaux et ne trouvaient grâce à ses yeux que les pourfendeurs de l’impérialisme et du colonialisme. Ainsi vouait elle une grande admiration à un jeune avocat, ténor de toutes ces causes réunies.

    Un jour que sa mère eut un différend qui devait se résoudre de manière judiciaire et qui mettait en péril son unique source de revenu, elle confia l’affaire à cet avocat, qu’on appellera Fanfan, se disant à elle-même “ s’il arrive à défendre avec autant de brio toutes ces causes, défendre ma mère et lui restituer ses droits ne sera pour lui qu’un jeu d’enfant ”. En outre son engagement était gage de son honnêteté.

    Fanfan lui fit un accueil chaleureux, surtout qu’elle n’était pas mal faite de sa personne ; il apaisa ses craintes en lui rappelant l’intransigeance du Droit et de la justice, lui fit un laïus qu’elle trouva admirable sur son combat solitaire et héroïque contre l’injustice dans ce bas monde, mais finalement Colombine se décida à rentrer car indisposée par des relents ammoniaqués qui s’échappaient des locaux de Fanfan. Que ces locaux soient sales, Colombine n’en avait cure car ce qui compte, se disait-elle, c’est la propreté de l’âme et un homme qui orne son cabinet d’une affiche proclamant “ Liberté et dignité pour le peuple ” est dispensé de préoccupations aussi prosaïques que l’hygiène. Donc, subjuguée, elle lui versa ses honoraires d’avance pour l’aider à mieux lutter contre le “nouvel ordre mondial”, mais aussi pour qu’il se paye des posters moins déchirés et moins kitsch que ceux dont il habillait ses murs.

    Le temps passait, mais Colombine ne songeait pas à s’inquiéter et rabrouait même sa mère quand elle “osait” s’insurger contre le fait que Fanfan avait tendance à la mener en bateau toutes les fois qu’elle lui demandait des nouvelles. Colombine comprenait qu’il puisse être occupé : le pauvre a dû gérer la guerre du Golfe, la politique américaine au Proche-Orient, la barbarie de Sharon, l’occupation de l’Irak, l’arrestation de Saddam Hussein…Et avec tous ces comités de soutien dont il s’occupe d’ici, il doit avoir fort à faire.

    Trois années passèrent et Fanfan devenait de plus en plus désagréable avec la vieille maman, Colombine comprenait qu’il puisse avoir beaucoup de chagrin, surtout après le revirement de Kaddafi ; mais sa mère était toujours privée de son unique source de revenu et rudoyée en plus de cela.

    Colombine se décida à l’appeler, il fut condescendant comme d’habitude et calma ses appréhensions en lui annonçant qu’ils avaient eu gain de cause après qu’il se fût décarcassé pour y parvenir à coup d’ordonnances sur requêtes, d’expertises, de contre-expertises et d’appel, bref ne manquait au tableau que le pourvoi en cassation. Cependant, l’exécution du jugement demandait quelque temps car la partie adverse tentait par tous les moyens de l’empêcher, disait-il.

    Voulant le croire, elle le crut encore et attendit, confiante. Mais les mois passaient et sa mère était plus sceptique que jamais, et Fanfan devenait introuvable et injoignable.

    Colombine se disait qu’il devait être fort occupé et se décida de se charger elle-même de l’exécution du jugement. Elle appela Fanfan pour qu’il lui donne une copie du jugement, mais quand il se résolut enfin à répondre à ses appels, elle fut étonnée par le ton hautain et méprisant qu’il prenait pour lui dire qu’elles le dérangeaient, elle lui exposa sa demande et il lui intima sèchement de passer à son bureau “ décentralisé ”, car en fait de bureau Fanfan en avait deux, au mépris de toute déontologie, pour récupérer son jugement. Le jour désigné, Colombine alla le trouver mais il n’y était pas et il lui posa ainsi d’innombrables lapins.

    Un jour qu’elle se décida à débarquer à l’improviste dans un de ses bureaux, elle eut l’heur de l’y trouver, mais le jugement était malheureusement, et selon les dires de Fanfan, dans l’autre bureau. Il lui fixa un rendez-vous auquel il ne se rendit jamais et il devint aussi introuvable que Ben Laden.

    Ecoutant les conseils d’amis moins innocents qu’elle, elle l’appela à partir d’un numéro qu’il ne connaissait pas, il décrocha, elle demanda des explications, il lui raccrocha au nez. Elle en demeura interdite pendant quelques jours puis chargea quelques-uns de ses anciens camarades de Fac, devenus avocats, d’extraire le jugement.

    Mais au grand dam d’eux tous, ils découvrirent que de jugement en leur faveur il n’y en avait pas. Tout ce qu’ils réussirent à trouver était une ordonnance sur la requête introduite par Fanfan et une annulation de cette même ordonnance pour vice de procédure. Une de ses anciens camarades qu’elle chargea de la recherche, nommée Petite Oie blanche et qui était restée amie avec elle, car souffrant du même syndrome d’»idéalisme anachronique», ne voulut pas croire que leur Fanfan tant admiré ait pu mentir aussi honteusement et effrontément, se disant qu’il y avait sûrement un malentendu. Elle l’appela, il la rasséréna en lui confirmant l’existence du jugement annoncé à Colombine et en lui demandant de passer prendre le jugement quand elle le désirait. Suivit alors une seconde disparition de Fanfan. Petite Oie blanche confia sa peine à des confrères avocats qui s’avéraient connaître intimement Fanfan, ils l’appelèrent chacun à leur tour et il répéta à chacun d’eux la version de l’existence du jugement et les problèmes que posait son exécution et il leur réitéra son intention de munir du jugement toute personne qui viendrait de la part de la famille de Colombine. Confiante, Petite Oie blanche alla le trouver mais il lui dit que le jugement était toujours chez l’huissier qui devait l’exécuter et lui promit de le ramener demain. Le lendemain Petite Oie blanche rappliqua mais Fanfan lui dit que l’huissier en question était en déplacement, ce qui rendait impossible la récupération du jugement et qu’ils pouvaient aller chercher ce jugement par leurs propres moyens.

    Un des anciens camarades de Colombine alla voir l’huissier qui lui annonça qu’il n’avait jamais eu aucun jugement de ce type à exécuter. N’en pouvant plus, Petite Oie blanche et une de ses cons½urs allèrent voir Fanfan pour avoir le fin mot; il les laissa attendre une heure au mépris de toute déontologie. Quand il les reçut, ce fut pour leur dire d’une manière cavalière que de copie du jugement il ne donnerait pas, que Colombine et sa mère pouvaient aller se plaindre et qu’il n’en avait cure, qu’il «avait le droit de mentir» (sic) et encore d’autres inepties. Quand elles lui dirent qu’il n’aurait pas dû les faire aller et revenir et attendre une heure pour proférer de tels propos, il ricana : “ Considérez que j’ai enfreint les règles de la déontologique, ça va ? ”. Elles s’empressèrent de sortir en ayant honte pour lui. Et elles vécurent malheureuses car désenchantées.



    Salwa Hamrouni, Juriste universitaire

  • #2
    Bienvenus dans ce bas monde , hélas c'est une pure vérité, l'intégrité de nos confrères avocats a quasiment disparu... l'exemple de Fanfan est un quotidien très banal, très courant

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    • #3
      La véritable trégédie est que ce phénoméne ne se limite désormais plus qu'aux avocats !!!!
      Mé où va le monde ??

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      • #4
        huh !! désolé g po pu tt lire g horreur de la lecture
        mais si c de l'action ou des romans de films ils se peu ke ça m'interresse
        la derniere chose ke j'avai lu et tro aimé c t l'alchimiste de paolo colheo c tro bien koi
        ça fesai revé
        sinon chui plutot Anne Rice ou Stephen King c le fantastike ki m'interresse tro

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        • #5
          je trouve ce post par hasar
          tu lis BB ?
          t'a lu koi exa temtn ???

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          • #6
            :grumble:

            point final...marci 3lik

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            • #7
              C'est très bien narré je trouve!!!

              Bravo à Selwa Hamrouni!

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              • #8
                Merci Dimpy ;)

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